J'errais sous les feuillus, le coeur léger, les semelles alourdies. Une ondée venait de tremper les arbres qui pleuraient sous les rayons d'avril. Nulle âme dans l'ancestrale forêt de Sillé-le-Guillaume, pas un bruit, juste une brise caressant quelques branches que reflètaient des flaques limpides. Le soleil se mêlant à l'onde, la lumière ruisselait sur les feuilles.
Je marchais, tranquille. Mes pas sous les restes de pluie faisaient des clapotements tristes dans cet univers d'humus et de troncs humides. L'air frais s'alliait à la lumière vernale dans une parfaite harmonie. Les sons résonnaient agréablement contre le bois. Ce léger écho après la pluie finissait de donner à l'atmosphère un caractère étincelant. Impressions de ruisseau aérien, de verte coulée céleste, de neige fondue teintée d'azur...
Tout à mon trouble, les idées de plus en plus vagues, j'avançais, charmé par cette ambiance éclatante et mélancolique.
Distrait, j'en oubliai la réalité qui m'entourait. A mesure que je marchais le long du sentier sylvestre, imperceptiblement je pénétrais dans un environnement subtil. Je ne sentis plus la boue amassée sous mon talon. J'avançai encore en baissant les paupières, ébloui par la face de Râ. Puis les éclats de l'astre cessèrent. Lorsque je rouvris les yeux, la forêt avait disparu. Une clarté inhabituelle tombait du ciel. Autour de moi, un espace étrange, sans limite, pareil à un immense jardin. De ce monde émanait une beauté indescriptible, impossible à retranscrire avec des mots humains. De toutes parts rayonnait la Beauté.
Sans m'en rendre compte j'étais arrivé de l'autre côté des choses visibles... Inexplicablement mes pas commencés depuis la forêt de Sillé-le-Guillaume m'avaient mené jusque dans ce champ de verdure aux reflets inconnus, à l'aspect inouï. Cette prairie lumineuse, loin d'être une illusion, avait ses fondations dans le ciel.
Je me crus mort.
Meurt-on aussi facilement en marchant ? En rêvassant ? J'étais pourtant là, les deux pieds posés sur un sol bien réel. Aux antipodes de la forêt de Sillé-le-Guillaume que, sans m'en apercevoir, je venais de quitter. Où étais-je ? Quel était ce monde radieux et énigmatique où je venais de pénétrer, poussé par le caprice d'un Ailé ou emporté par une étrange brise cosmique ? Salle d'attente du séjour des défunts ? Antichambre de l'éternité ? Porte de l'Eden ? Venais-je d'être projeté en ces lieux par erreur ou sous l'effet de quelque volonté angélique ?
Mystère.
Toujours est-il que je me suis aussitôt retrouvé étendu au bord du chemin pédestre, le front rafraîchi par un zeste de pluie émanant de l'arbre contre lequel je m'étais endormi, un sentiment cosmique dans l'âme, une persistante, profonde sensation de réalité en moi.
De cette brève, fantastique promenade dans l'Ailleurs je garderai à jamais l'extrême saveur, la divine, l’intolérable nostalgie.
Je marchais, tranquille. Mes pas sous les restes de pluie faisaient des clapotements tristes dans cet univers d'humus et de troncs humides. L'air frais s'alliait à la lumière vernale dans une parfaite harmonie. Les sons résonnaient agréablement contre le bois. Ce léger écho après la pluie finissait de donner à l'atmosphère un caractère étincelant. Impressions de ruisseau aérien, de verte coulée céleste, de neige fondue teintée d'azur...
Tout à mon trouble, les idées de plus en plus vagues, j'avançais, charmé par cette ambiance éclatante et mélancolique.
Distrait, j'en oubliai la réalité qui m'entourait. A mesure que je marchais le long du sentier sylvestre, imperceptiblement je pénétrais dans un environnement subtil. Je ne sentis plus la boue amassée sous mon talon. J'avançai encore en baissant les paupières, ébloui par la face de Râ. Puis les éclats de l'astre cessèrent. Lorsque je rouvris les yeux, la forêt avait disparu. Une clarté inhabituelle tombait du ciel. Autour de moi, un espace étrange, sans limite, pareil à un immense jardin. De ce monde émanait une beauté indescriptible, impossible à retranscrire avec des mots humains. De toutes parts rayonnait la Beauté.
Sans m'en rendre compte j'étais arrivé de l'autre côté des choses visibles... Inexplicablement mes pas commencés depuis la forêt de Sillé-le-Guillaume m'avaient mené jusque dans ce champ de verdure aux reflets inconnus, à l'aspect inouï. Cette prairie lumineuse, loin d'être une illusion, avait ses fondations dans le ciel.
Je me crus mort.
Meurt-on aussi facilement en marchant ? En rêvassant ? J'étais pourtant là, les deux pieds posés sur un sol bien réel. Aux antipodes de la forêt de Sillé-le-Guillaume que, sans m'en apercevoir, je venais de quitter. Où étais-je ? Quel était ce monde radieux et énigmatique où je venais de pénétrer, poussé par le caprice d'un Ailé ou emporté par une étrange brise cosmique ? Salle d'attente du séjour des défunts ? Antichambre de l'éternité ? Porte de l'Eden ? Venais-je d'être projeté en ces lieux par erreur ou sous l'effet de quelque volonté angélique ?
Mystère.
Toujours est-il que je me suis aussitôt retrouvé étendu au bord du chemin pédestre, le front rafraîchi par un zeste de pluie émanant de l'arbre contre lequel je m'étais endormi, un sentiment cosmique dans l'âme, une persistante, profonde sensation de réalité en moi.
De cette brève, fantastique promenade dans l'Ailleurs je garderai à jamais l'extrême saveur, la divine, l’intolérable nostalgie.